CRÉER, RECRÉER, RÉCRÉER…


2-Dec-2015   -   L'ORIENT-LE JOUR

Comme chaque année, Lorraine et Jacques Ouaiss partent à la découverte de nouveaux artistes libanais.

 

Nayla Romanos Iliya, Carla Barchini et le collectif Hawini Artwork forment le trio d'«Artistes à découvrir» que propose la galerie Jacques Ouaiss*, jusqu'au 3 décembre. Trois artistes aux univers, styles et démarches différents. Même si tous font œuvre de (re)création sur le mode récréatif.
Architecte et designer de formation, Nayla Romanos Iliya a été amenée à beaucoup voyager au cours de ces deux dernières décennies et à résider dans des villes aussi différentes que Paris, Londres, Hong Kong ou Dubaï. Ce déracinement incessant a, forcément, titillé sa nostalgie et sa fibre patriotique. Et l'a conduit à s'intéresser à ses racines phéniciennes. C'est ainsi qu'elle découvrira l'alphabet phénicien, «le plus important accomplissement de ces grands communicateurs qu'étaient nos ancêtres», dit-elle fièrement. De cette quête d'identité jaillira l'inspiration. Celle d'une série de sculptures en éditions limitées (à 8 pièces chacune) mais de dimensions et matériaux variés, reprenant les formes et les configurations de chacune des 22 lettres phéniciennes. Harmonieuse alliance de symbolique patrimoniale et d'esthétique contemporaine, ces pièces en bronze, laiton ou résine colorée, l'artiste les réunit aussi parfois sur un socle commun (en inox à effet miroir) pour composer des mots symboliques et raconteur d'histoires, à l'instar de «Hobb», «Salam» ou Beyrouth...
Carla Barchini recrée elle aussi le passé. À sa manière. Dans un mélange de matériaux bruts et de sensibilité exacerbée. Cette artiste gréco-libanaise, formée à la restauration de meubles et notamment aux techniques de dorure, de marqueterie, de sculpture et peinture, a détourné ce savoir-faire acquis à Florence pour redonner une seconde vie, picturale et poétique, aux objets qu'elle récupère sur son chemin. De vieilles carrosseries d'automobiles et d'anciennes lattes de plancher en bois, traitées à coups de marteaux, jets de peinture, oxydation et déformation, deviennent ainsi les supports de ses peintures aux tracés d'une exquise délicatesse. Des œuvres d'une fantaisie éthérée faite d'entrelacements chimériques de labyrinthes, d'échelles, de montagnes, de funambules, d'étoiles, de fleurs et de ballons...
Récréatif également, mais aussi caritatif d'une certaine façon, le pop art des années cinquante, celui d'Andy Warhol ou de Roy Lichtenstein revisité avec de nouvelles techniques par le collectif Hawini Artwork. Composé d'un architecte (Wissam Moubarak), d'une designer (Nesrine Nasr) et d'un assistant social (Haytham Hreiz), ce collectif fait de l'art pour... l'entraide. C'est dans cette optique qu'il reproduit au pochoir sur plexi et panneaux de bois des œuvres ultraconnues qu'il fait ensuite perler ou clouter, entièrement à la main, par des personnes en quête de travail. Présentés sous cadres vitrés, quelques-uns de ces tableaux recréent également de célèbres affiches ou billets verts dans des compositions entièrement élaborées à partir de centaine de dés à jouer !